Avis de recherche: qui veut connaître Joseph?

Photo décembre 2010 : Daniel Picot, alors directeur du Centre de recherche et de documentation de l’Oratoire Saint-Joseph.

Pourquoi créer des centres de recherche pour étudier saint Joseph? Penser à Joseph, prier Joseph, tout cela a été pratiqué depuis des siècles! Mais prendre la personne de Joseph comme sujet d’études scientifiques, voilà qui est récent et a représenté une manière nouvelle de répondre à un besoin ancien.

Qui peut affirmer bien connaître saint Joseph? Il y en a qui l’ont fait sans hésitation, s’exclamant à propos de Jésus qui les scandalisait : « N’est-ce pas le fils du charpentier? » (Mt 13,55) « N’est-ce pas Jésus, le fils de Joseph? Ne connaissons-nous pas son père et sa mère? Comment peut-il déclarer maintenant : ‘Je suis descendu du ciel‘? » (Jn 6,42). C’était les habitants de Nazareth.

Ils connaissaient Joseph! L’identité sociale de Jésus était évidente aux yeux de ses compatriotes en référence à celle de son père Joseph, leur voisin, l’artisan du village dont ils étaient les clients. Ils connaissaient tellement bien Joseph dans le concret de la vie quotidienne qu’ils ne pouvaient se faire à l’idée que Jésus, « fils du charpentier », possède une quelconque autre origine, n’étant surtout pas « descendu du ciel », prétention farfelue et abusive à l’aune de leurs « connaissances ». C’était le choc de l’évidence de la condition humaine contre la reconnaissance d’une origine divine.             

Nous sommes depuis ce temps devant un retournement historique: à Nazareth la connaissance concrète de Joseph a d’abord entravé la connaissance de Jésus Fils de Dieu puis, à l’inverse, dans la suite des siècles, l’affirmation de l’origine divine du Verbe incarné a entravé la reconnaissance du rôle concret de Joseph dans le Plan du Salut. Le temps des contemporains qui « connaissaient Joseph » étant révolu, de larges pans de l’opinion chrétienne n’ont plus vraiment reconnu Joseph en tant que père humain de plein droit avec son utilité dans le parcours terrestre du Messie.

Pour une fois la réalité n’est pas dans le juste milieu mais dans la coexistence des extrêmes : l’humain et le divin. Malheureusement, du côté humain, autant la présence de Marie au côté de Jésus, « le charpentier fils de Marie » (Mc 6,3), a été magnifiée, autant la présence de Joseph a été sous-estimée voire ignorée pendant des siècles. Cette longue occultation ne paraît plus, maintenant que la lente accumulation d‘écrits, témoignages, œuvres d’art, sanctuaires, paroisses et lieux de culte dédiés, actes du magistère, etc., a fini par donner à Joseph une épaisseur de présence qui semble avoir existé de tout temps, ce qui est faux.

Nous ne referons pas l’histoire de ce lent cheminement vers une meilleure connaissance de Joseph et de la lente diffusion de la dévotion envers lui pendant deux millénaires. Nous sauterons d’emblée de Nazareth, où les auditeurs disaient « connaître Joseph », à une innovation moderne pour découvrir Joseph par la création de Centres de recherche scientifique sur sa personne! Voilà qui aurait bien surpris les Nazaréens du premier siècle! C’est notre XXe siècle qui a vu l‘éclosion de ces expériences originales alors que la science triomphante envahissait tous les domaines de la vie.   

On connait la longue liste des disciplines profanes en sciences humaines : histoire, sociologie, psychologie, anthropologie, etc. Dans le domaine religieux on avait déjà bien des disciplines comme théologie, christologie, ecclésiologie, patrologie, sotériologie, eschatologie, mariologie, etc. Il restait à en créer une pour saint Joseph. Ce fut, logiquement, la joséphologie. Et ce fut une surprise pour beaucoup, jusqu’à susciter quelques polémiques comme toute nouveauté.

J’ai eu le grand privilège d‘être intimement mêlé pendant dix ans à la vie d’un de ces Centres, le Centre de recherche et de documentation de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, à Montréal, et de quelques autres par la suite. L’histoire de cette innovation est fascinante et elle a porté des fruits au-delà des espérances, fruits que je vous partagerai au cours de prochaines parutions. Au plaisir de se retrouver dans cette recherche… 


Voir aussi l’article Bref historique d’une perle précieuse: Le Centre de recherche et de documentation sur saint Joseph